Virginie et moi, c’était une évidence depuis le début. Pas une évidence amoureuse, du moins pas tout de suite, mais une connexion rare, précieuse. Nous nous étions rencontrés il y a quelques mois, chacun en couple, chacun luttant à sa manière pour préserver une relation qui semblait s’effriter avec le temps.
Elle était cette amie sur qui je pouvais compter, celle à qui je pouvais tout dire sans crainte d’être jugé. Nos conversations s’étiraient parfois tard dans la nuit, des messages échangés sur nos doutes, nos frustrations, mais aussi sur nos joies, nos petits moments de bonheur. Elle comprenait mes silences, et moi, je savais décrypter ses soupirs.
Virginie, c’était une femme magnifique, mais elle ne semblait pas en avoir conscience. Elle parlait souvent de ses complexes, de ses petites rondeurs qu’elle trouvait gênantes, alors que pour moi, elles faisaient partie de son charme. J’aimais sa façon de sourire timidement quand je la complimentais, comme si elle ne savait pas si elle devait me croire.
Au fil du temps, une tendresse particulière s’était installée entre nous. Une tendresse qui dépassait l’amitié, sans que nous osions vraiment la nommer. J’aimais sa présence, nos moments ensemble, nos éclats de rire partagés. Mais je me persuadais que ce n’était que de l’amitié, que jamais nous ne franchirions cette ligne invisible.
Jusqu’à ce jour-là…
Ce matin-là, mon téléphone a vibré. Le nom de Virginie s’est affiché sur l’écran. J’ai tout de suite senti que quelque chose n’allait pas.
— Steve… J’ai besoin de toi.
Sa voix était brisée, tremblante. Elle pleurait. Mon cœur s’est serré instantanément.
— Qu’est-ce qui se passe ?
— Je préfère te le dire en face… Viens, s’il te plaît.
Sans réfléchir, j’ai attrapé mes clés et je suis parti. Je ne savais pas encore que cette journée allait tout changer.

Lorsque je suis arrivé chez Virginie, il n’y avait pas de bruit. La porte était entrouverte, et je suis entré doucement, comme si je craignais de troubler un équilibre fragile. Elle était là, assise sur le canapé, les yeux rougis par les larmes. Il y avait quelque chose de presque irréel dans l’atmosphère, une tension, une fragilité qui rendait tout plus intense.
Elle n’a pas eu besoin de me dire un mot. À peine que je m’étais approché, elle s’est levée d’un bond et s’est jetée dans mes bras, les larmes redoublant de plus belle. C’était comme si le monde autour d’elle s’effondrait, et elle n’avait que moi pour se raccrocher.
— Merci d’être là, Steve… je… je suis tellement perdue.
Je l’ai serrée plus fort, essayant de la rassurer, mais en réalité, c’était moi qui me sentais perdu. Qu’est-ce qui pouvait bien se passer dans sa tête à ce moment-là ? Pourquoi cette douleur soudaine au cœur ? Je ne savais pas encore ce que j’allais découvrir.
Je l’ai aidée à se calmer, à respirer, mais je voyais bien qu’elle n’était pas juste effrayée par sa douleur physique. Il y avait quelque chose de plus. Quelque chose qu’elle ne disait pas, mais que je ressentais au fond de moi.
— Dis-moi ce qui ne va pas, Virginie… Tu peux tout me dire.
Elle m’explique qu’elle s’est réveillée avec une douleur persistante au niveau de son cœur, une gêne qui l’inquiète. Elle me confie qu’elle doit absolument consulter son médecin. Quand elle me parle de son compagnon, il y a dans ses yeux une certaine confusion, une hésitation. Puis, subitement, les émotions l’emportent, et elle éclate en sanglots, comme si les mots étaient trop lourds à dire.
— Mon compagnon… Il n’a pas voulu m’accompagner. Je… Je crois qu’il ne comprend pas. Mais toi, tu es là… Je savais que tu viendrais.
J’ai eu une bouffée de colère, mais je ne voulais pas qu’elle la ressente. Je me suis contenté de caresser ses cheveux, de lui murmurer que tout allait bien se passer. Mais à l’intérieur, un sentiment de frustration m’envahissait. Pourquoi ne l’avait-il pas soutenue ? Pourquoi l’avait-il laissée seule dans un moment aussi difficile ?
Nous avons décidé de partir ensemble chez le médecin, et tout au long du trajet, le silence pesait lourd. Elle était dans ses pensées, et moi dans les miennes, me demandant où cela allait nous mener. Elle n’avait toujours pas évoqué ses sentiments, ceux que j’avais aussi, ces sentiments que j’avais soigneusement enfermés dans une boîte invisible, par peur de les laisser s’échapper. Mais ce silence était lourd de non-dits.
Le silence dans la salle d’attente me semble d’une lourdeur infinie, comme si chaque seconde s’étirait sans fin. Mon regard reste rivé sur la porte du cabinet, espérant la voir s’ouvrir, espérant voir Virginie en sortir. Mais le temps passe, interminable. L’attente me pèse, me tord les tripes. Je veux qu’elle aille bien, qu’il n’y ait rien de grave, mais une petite voix au fond de moi murmure qu’il y a plus que ce qu’elle me laisse entrevoir. Je me perds dans mes pensées, tentant de comprendre ce qui se joue derrière cette porte. Pourquoi semble-t-elle si fragile, si perdue ? Pourquoi doit-elle affronter cela seule ?
Enfin, la porte s’ouvre. Le médecin apparaît, l’air grave. Mais Virginie n’est pas derrière lui. Mon cœur rate un battement. Sans un mot, il me tend son sac à main, et une pression sourde s’abat sur ma poitrine. Une angoisse nouvelle s’insinue en moi.
— Elle va bien, mais vous devez l’emmener à l’hôpital pour des examens complémentaires, dit-il avec une douceur mesurée, mais aussi une pointe d’urgence dans la voix.
J’acquiesce, sans vraiment comprendre tout de suite. Mon esprit s’embrouille. Le médecin s’éloigne, me laissant seul avec ce sac, avec ce lien direct vers Virginie. Je prends une grande inspiration avant d’avancer vers la porte. Lorsqu’elle sort enfin, elle est pâle, les yeux rougis par les larmes. Mais elle tente un sourire. Un sourire fragile, incertain.
Sans un mot, je lui tends son sac. Elle le récupère, et je remarque que ses mains tremblent légèrement. Je veux lui dire quelque chose, lui assurer que je suis là, qu’elle n’est pas seule, mais les mots restent bloqués. Pourtant, je ressens cette tension, ce moment suspendu entre nous, comme si quelque chose venait de changer sans que l’on puisse encore le nommer.
Mon regard glisse involontairement vers l’intérieur du sac, et un détail capte mon attention. Là, posé discrètement au fond, son soutien-gorge. Un frisson me traverse. Mon esprit s’emballe malgré moi. Pourquoi est-il là ? Pourquoi ne l’a-t-elle pas remis avant de sortir ? Un flot d’images et de pensées se bousculent dans ma tête, mais je me force à les chasser. Ce n’est ni le lieu ni le moment. Je ferme les yeux un instant, tentant de garder le contrôle sur mes pensées. L’urgence est ailleurs.
— Virginie, ça va aller, dis-je doucement en prenant sa main. Je suis là. On va à l’hôpital, tout va bien se passer.
Elle hoche la tête sans un mot, son regard encore perdu dans le vide. Je sais qu’elle cherche du réconfort, qu’elle s’accroche à ma présence, et c’est tout ce qui compte.
Sans un mot de plus, nous prenons la route. Mais à chaque kilomètre, une question me brûle les lèvres, une question que je n’ose formuler : ce détail, cet oubli, a-t-il une signification ? Ou n’est-ce qu’un simple hasard, un effet du stress et de la précipitation ?

Je me force à repousser cette pensée. Pour l’instant, seule elle compte.
Dès que nous franchissons les portes de l’hôpital, l’atmosphère change. L’air est plus froid, plus aseptisé, et autour de nous, tout semble aller trop vite. Il y a cette urgence constante, ces allées et venues de soignants et de patients, cette impression que le monde continue de tourner, indifférent à ce que nous sommes en train de vivre.
On nous conduit dans une chambre d’examen, un espace trop blanc, trop impersonnel. Virginie s’assoit sur le lit, les mains serrées sur ses genoux. Elle fixe un point invisible devant elle, perdue dans ses pensées. Je vois bien qu’elle tente de rester forte, de maîtriser l’angoisse qui la ronge, mais son souffle un peu trop rapide et ses doigts qui tremblent légèrement trahissent son état.
Je m’installe sur la chaise près du bureau, lançant un regard circulaire à la pièce. Chaque bruit, chaque mouvement me semble amplifié, rendant l’attente plus pesante encore. J’aimerais lui parler, la rassurer, mais elle évite mon regard, enfermée dans son silence.
Soudain, la porte s’ouvre, et un jeune infirmier entre. Son ton est calme, professionnel, mais je perçois dans son attitude qu’il devine la tension dans l’air.
— Bonjour, madame. Le médecin va pratiquer une échographie pour s’assurer que tout va bien. Je vais préparer l’examen.
Je me lève instinctivement, prêt à lui laisser de l’intimité, mais à peine ai-je fait un pas qu’une voix douce m’arrête.
— Steve… reste, s’il te plaît.
C’est presque un murmure, mais il me cloue sur place. Je la regarde, surpris. Son regard accroche le mien, et j’y lis une forme de réconfort, un besoin silencieux de ma présence.
Alors je me rassois, sans un mot.
L’infirmier s’affaire à préparer le matériel. Il sort un flacon de gel et installe l’échographe. Puis, d’un ton posé, il explique à Virginie qu’il va falloir retirer son haut pour permettre l’examen.
Un léger silence s’installe dans la pièce, presque palpable. Elle semble hésiter, ses doigts effleurent timidement le bas de son pull avant qu’elle ne prenne une grande inspiration, comme pour se préparer à ce geste. Lentement, elle soulève son vêtement, laissant la lumière froide de la pièce effleurer sa peau, l’embrassant en douceur.
Chaque mouvement est empreint de précaution, presque d’une révérence envers ce corps qu’elle s’apprête à dévoiler, et mon regard, bien malgré moi, suit le chemin que trace son geste. L’air semble se figer autour de nous, comme suspendu dans un moment hors du temps.
Je lutte pour garder mon calme, mais un tremblement léger traverse mon être à mesure que son corps se révèle sous la lumière. Sa peau, douce et pâle, contraste avec les ombres et la lumière dure de la pièce, créant un jeu de nuances délicates.
Chaque détail m’impressionne : la courbure subtile de sa poitrine, la façon dont elle semble s’épanouir naturellement sous le froid qui envahit la pièce. Elle frissonne légèrement, comme si la température de l’air réagissait à la tension palpable, et je ressens cette fragilité dans l’instant. Un frisson traverse son corps, non seulement sous l’effet du froid, mais aussi, sans doute, du stress qui accompagne le moment.
Elle semble suspendue dans l’espace, comme si son corps flottait, un peu plus lourd mais aussi un peu plus léger à chaque respiration. Ses seins, naturellement arrondis, semblent soulignés par la lumière, et j’aperçois les ombres qui dansent sur sa peau.
Le contraste entre la blancheur de son corps et les teintes plus profondes de ses tétons, qui se dressent sous l’effet du froid et de la tension du moment, capte une attention involontaire. C’est un contraste entre la douceur et la force, entre l’intimité fragile et la beauté brute de ce corps qui se montre. Mon souffle se coupe, non seulement par l’émerveillement, mais aussi par la sensation de partager quelque chose de profondément intime et humain.
Je devrais détourner les yeux. Je le sais. Mais c’est impossible.
L’infirmier reste professionnel, concentré sur son geste. Il applique le gel froid sur sa peau, et je vois Virginie frissonner. Elle ferme un instant les yeux, crispant légèrement les doigts sur le drap du lit.
Puis la porte s’ouvre à nouveau.
Le médecin entre, un homme d’âge mûr à l’air posé et bienveillant. Il s’approche avec calme et salue Virginie d’un ton rassurant.
— Nous allons commencer. Essayez de vous détendre.
Il pose la sonde sur sa poitrine et débute l’examen. L’écran s’anime d’images que je ne comprends pas, mais je peine à m’y intéresser. Mon regard oscille entre Virginie et la scène qui se déroule sous mes yeux.
Chaque seconde semble durer une éternité.
Je devrais penser à autre chose. Me concentrer sur les raisons médicales de notre présence ici. Mais la tension dans l’air est trop forte, trop palpable. Virginie garde les yeux rivés sur le plafond, mais je sens son trouble, son souffle légèrement irrégulier.
Je suis là pour elle. Pour la soutenir.
Et pourtant, au fond de moi, je sais que cet instant vient de tout changer.
L’examen continue, et dans cette pièce d’hôpital, tout semble ralentir autour de moi. Je suis là, assis, le regard fixé sur Virginie. Ses yeux sont fermés, concentrés sur l’échographie qui se déroule sur son corps. Mais moi, je suis ailleurs. Mon regard erre involontairement, se perd dans sa silhouette, dans la vulnérabilité qu’elle affiche sans le savoir. Je vois sa poitrine, sa peau douce, et une partie de moi veut la respecter, lui laisser son espace, mais l’autre se laisse emporter par le moment. Je me sens à la fois coupable et fasciné.
Je n’arrive plus à détacher mes yeux d’elle. Il n’y a plus rien autour, plus de bruit, plus de monde, juste elle, là, dans cette position si intime. J’ai envie de détourner le regard, de me concentrer sur autre chose, mais je suis comme figé, comme si ce moment était suspendu.
Le médecin, conscient de la situation, reste professionnel. Il parle de façon calme, rassurante, comme s’il a l’habitude de gérer des situations d’intimité comme celle-ci. Il explique qu’un test d’effort est nécessaire pour écarter toute possibilité de problème cardiaque. La douceur de ses paroles me rappelle brusquement que ce moment n’est pas là pour qu’on s’attarde sur des détails physiques, mais bien pour sa santé.
L’infirmier se rapproche pour préparer le test. Il explique les étapes, et Virginie, sans se rhabiller, se laisse faire. L’infirmier place les électrodes sur sa peau, effleurant parfois sa poitrine avec une certaine délicatesse, mais son geste reste clinique, professionnel. Pourtant, je ne peux m’empêcher de ressentir l’intensité de la scène. Je me force à garder mon calme, à me rappeler qu’elle est là pour des raisons médicales et non pour une quelconque autre chose.
Virginie commence à pédaler sur le vélo d’effort, ses jambes se mouvant avec une régularité que j’essaie de suivre du regard, mais je ne peux m’empêcher de remarquer la manière dont son corps réagit à chaque coup de pédale. Les mouvements sont fluides, naturels, et ses seins bougent légèrement, au rythme de l’effort. Ce n’est pas quelque chose que je devrais observer, mais c’est comme si mon esprit n’arrivait plus à se concentrer sur autre chose.
Je me sens pris dans un tourbillon de pensées contradictoires. D’un côté, je veux rester respectueux, la soutenir sans franchir aucune ligne, et de l’autre, quelque chose en moi me pousse à voir plus, à comprendre plus. Mais ce n’est pas le moment pour cela. Je secoue doucement la tête, comme pour chasser ces pensées. Ce moment appartient à Virginie, à son bien-être, pas à mes réflexions personnelles.
Finalement, après quelques minutes, le test prend fin. L’infirmier invite Virginie à se rhabiller, et un silence lourd s’installe dans la pièce. Il se retire pour lui donner un peu d’intimité, et je me retrouve seul avec elle. Elle prend son temps pour se vêtir, et moi, je reste là, les yeux rivés sur le sol, gêné par l’intensité de ce qui vient de se passer. J’ai du mal à la regarder, à affronter son regard, car je sais qu’au fond, elle a perçu ce qui s’est joué dans cet instant. Un moment entre nous deux, silencieux, mais lourd de sens.
Elle finit par se rhabiller, et je la regarde à peine. Je veux que tout ça soit derrière nous, mais l’ambiance entre nous deux a changé. Je n’arrive pas à la regarder comme avant. C’est comme si ce simple test, ce geste involontaire, avait fait naître quelque chose de nouveau entre nous, une tension nouvelle que je ne sais pas comment gérer.
Après l’examen, un léger silence règne dans la pièce. Virginie me rejoint enfin, ses pas résonnant doucement sur le sol. Elle semble moins tendue, bien que ses yeux trahissent une certaine inquiétude. Elle s’assoit à mes côtés, et, d’un geste automatique, je prends sa main dans la mienne, cherchant à partager un peu de cette tranquillité retrouvée.
Le médecin nous regarde avec un sourire rassurant, une douceur dans le regard qui apaise instantanément l’angoisse qui persistait. Il commence à parler d’une voix mesurée, expliquant que l’examen n’a révélé rien de préoccupant.
– il n’y a rien de grave, dit-il, en insistant sur le fait que Virginie n’a besoin que de repos, qu’il s’agit d’un moment de fatigue, sans raison alarmante.
– Un peu de repos, de la détente, et tout ira bien, ajoute-t-il, d’une voix douce.
Ses mots, simples mais pleins de sérénité, agissent comme un baume apaisant sur nos esprits encore tourmentés. Virginie, qui jusque-là avait semblé tendue, relâche enfin son souffle, un léger sourire apparaissant sur ses lèvres. Je la vois se détendre peu à peu, comme si le poids de l’inquiétude s’était dissous sous l’effet de ces mots. Elle hoche lentement la tête, comme pour accepter cette bonne nouvelle, mais son regard me cherche un instant, comme si elle avait besoin de confirmer que tout va bien.
Après l’examen, nous quittons enfin l’hôpital. Le vent frais qui souffle dehors nous enveloppe d’une brise légère, mais il n’y a plus cette tension palpable qui nous habitait auparavant. Virginie marche à mes côtés, ses pas plus légers, comme si la lourde inquiétude qui pesait sur elle s’était dissipée en même temps que les paroles rassurantes du médecin. Nous n’échangeons pas beaucoup de mots, mais ce silence n’est pas pesant. Au contraire, il est apaisant, comme une sorte de communion tacite entre nous, une tranquillité partagée.
Nous atteignons ma voiture, et je laisse Virginie s’installer côté passager. La route qui s’étend devant nous est calme, presque déserte à cette heure, et les lumières de la ville se reflètent doucement sur le pare-brise. Je démarre le moteur, et le bruit du moteur, léger et constant, semble se fondre dans l’ambiance paisible de la soirée. Le trajet se fait dans une sorte de lenteur, comme si le temps lui-même avait décidé de se suspendre pour nous offrir ce moment de répit.
À côté de moi, Virginie regarde défiler les paysages sans vraiment prêter attention, ses pensées sûrement ailleurs, mais son visage détendu trahit une forme de sérénité nouvelle. De temps en temps, je jette un coup d’œil furtif dans sa direction, et je la vois fermer les yeux un instant, comme pour savourer le calme de ce moment. Le monde extérieur semble lointain, et tout ce qui compte à cet instant, c’est la route tranquille qui nous mène à son appartement.
Nous montons ensemble dans son appartement, l’air lourd de non-dits, et je sens que quelque chose a changé. Ce n’est plus la même Virginie que je connais. Elle est différente, et ce silence entre nous est presque palpable. Elle me dit qu’elle va prendre une douche pour enlever le gel de l’examen, et je m’assois dans le canapé, les mains entrelacées, le regard perdu dans les objets de la pièce. J’essaie de remettre mes pensées en ordre, mais il est difficile de chasser ce qui vient de se passer.
Quelques minutes passent. Le bruit de l’eau qui coule dans la salle de bain me ramène à l’instant présent. Je m’efforce de me détendre, mais mon esprit n’arrête pas de tourner autour de ce qui s’est produit, du regard que j’ai posé sur elle, de ce silence que nous avons partagé après.
Puis, elle revient, et je suis à nouveau frappé par la beauté qu’elle dégage, presque irréelle dans cette lumière tamisée. Son corps est enveloppé dans un peignoir rose, mais même ainsi, il semble y avoir une énergie tranquille autour d’elle, une présence qui m’envahit. Je la regarde, un peu perdu dans ce qu’il se passe entre nous. Ses yeux rencontrent les miens, et il y a quelque chose de direct dans ce regard, un peu comme si elle savait ce que j’ai ressenti, ce que j’ai observé.

Elle s’avance doucement, ses mouvements calmes, mais il y a une force silencieuse dans chacun d’eux. Sans détour, elle commence à défaire le nœud de son peignoir, le laissant tomber au sol, jusqu’à ce qu’elle soit complètement nue devant moi. Le temps semble suspendu. Je la regarde sans pouvoir détourner les yeux, un mélange d’émerveillement et de confusion se mêlant en moi.
Son regard se fait plus intense, et elle brise finalement le silence, sa voix douce mais ferme.
— Je t’ai vu me regarder, Steve. Personne ne m’a jamais regardée avec une telle envie. Dis-moi… est-ce que tu me trouves belle, malgré mes rondeurs ?
Il y a une sincérité désarmante dans sa question, comme si, malgré sa beauté évidente, elle doutait encore d’elle-même. C’est une question intime, une vulnérabilité qui me frappe en plein cœur. Et je me retrouve là, pris entre un désir intense de lui répondre et la réalité de ce que j’ai ressenti, du regard que j’ai posé sur elle plus tôt.
Je suis conscient de l’importance de ce moment. Ce n’est pas juste une question de beauté physique. C’est une question de respect, de ce que je ressens pour elle dans son entier. Une part de moi, la plus honnête, souhaite lui répondre avec toute la vérité, mais une autre part, plus réservée, hésite. Parce que, dans ce moment-là, je réalise que ce qui compte, c’est l’émotion que l’on dégage, l’intensité du lien, et non seulement ce qui est visible.
Je la regarde à nouveau, et cette fois, mes yeux sont plus doux.
— Virginie, tu es magnifique. Pas juste pour ton corps, mais pour qui tu es. Et oui, tu es belle, vraiment belle. Mais c’est ta douceur, ta lumière, ta gentillesse… c’est ça qui me touche.
Elle me fixe, et dans ses yeux, je vois cette lueur fragile, comme si ma réponse l’apaisait, mais aussi, peut-être, comme si elle l’avait déjà su, au fond. Elle sourit légèrement, mais il y a encore cette part de doute, quelque chose de plus profond qu’elle essaie de cacher.
Et dans cet instant suspendu, je comprends que ce qui se passe entre nous est plus qu’une simple attirance physique. C’est une connexion qui dépasse les mots, qui ne se résume pas à des gestes ou des regards, mais qui se construit dans le respect et la compréhension silencieuse de ce que nous sommes chacun.
Virginie se détache de moi presque immédiatement, son regard s’affolant alors qu’elle réalise que son compagnon, Arthur, va rentrer à tout moment. Elle se précipite, se dirigeant vers le fauteuil en face de moi, presque comme si elle cherchait à fuir l’instant, à retrouver une forme de sécurité. Ses gestes sont rapides, nerveux. Je la vois se rasseoir, et je comprends sans un mot qu’elle essaie de retrouver une certaine distance, de remettre de l’ordre dans ce qui vient de se passer.
Quelques secondes plus tard, la porte s’ouvre, et Arthur entre. Il nous salue avec son habituelle nonchalance. Ses yeux se posent sur nous, puis il se tourne vers Virginie, lui dépose un baiser sur la joue.
— Tu es en peignoir à cette heure-ci, Virginie ? demande-t-il, un brin surpris, mais sans réelle méfiance.
Il ne se doute de rien. Pour lui, il n’y a que l’instant présent, l’image qu’il perçoit, sans soupçonner ce qui s’est joué avant son arrivée.
— J’ai eu une longue journée… Je t’attendais pour aller prendre une douche, réponds-je, d’une voix posée, cherchant à paraître naturelle.
Mais mon regard, malgré moi, trahit un mensonge trop évident.
C’est une fausse justification, mais je n’ai pas le choix. Je ne peux pas lui dire la vérité. Pas maintenant. Pas devant Virginie, pas devant nous deux. Ce qui s’est passé entre elle et moi reste entre nous.
Je jette un regard furtif vers Virginie, assise dans le fauteuil. Elle semble gênée, un peu perdue, mais elle ne dit rien. Elle attend, elle observe, comme si elle se demandait si cette situation allait changer quelque chose dans la dynamique entre nous trois.
Arthur ne semble pas se douter de l’agitation sous-jacente dans la pièce. Il s’installe tranquillement, comme si rien ne venait de se passer, et commence à parler de sa journée, inconscient des lourds non-dits qui pèsent sur nous. Mais moi, je sais que tout a changé. Le simple fait d’avoir menti, d’avoir dissimulé une partie de la vérité, m’a fait franchir un point de non-retour. Et je comprends que, pour Virginie aussi, rien ne sera plus jamais comme avant.
Alors que Virginie s’est réfugiée dans la salle de bain, Arthur en profite pour me questionner sur la journée. Je lui raconte les examens qu’elle a passés, l’attente interminable, le soulagement après les paroles du médecin. Il écoute d’un air distrait, hochant la tête de temps à autre, avant de poser une question plus directe :
— Tu étais avec elle pendant les examens ? Tu l’as vue ?
Je hoche la tête sans chercher à cacher la vérité.
— Elle était… dénudée ? demande-t-il, un sourire en coin, une lueur moqueuse dans les yeux.
Je réponds simplement « oui ».
Arthur ricane légèrement, puis son ton se fait plus désinvolte, presque méprisant.
— Franchement, je ne vois pas comment tu fais. Elle n’a rien d’attirant… T’as vu sa poitrine ? Ces seins couverts de vergetures, comme si sa peau n’avait jamais réussi à suivre sa croissance. Ils ont gonflé trop vite, ça se voit. Ils pendent, et franchement, ce n’est pas joli. Pas fermes, pas ronds comme ils devraient l’être. Personne ne peut aimer ça…
Il parle avec assurance, comme s’il énonçait une vérité universelle. Comme si le corps de Virginie était un sujet d’analyse froide, un simple assemblage de défauts à énumérer.
Je l’écoute en silence, une boule se formant dans mon estomac. Il ne comprend pas. Il ne voit rien. Moi, j’ai vu autre chose.
J’ai vu la douceur de sa peau, la manière dont la lumière caressait ses formes, les frissons qui parcouraient son corps. J’ai vu la sensualité dans chaque détail, dans chaque courbe naturelle, dans chaque trace laissée par le temps et la vie. J’ai vu une beauté qui lui échappe, une féminité authentique, loin des jugements creux et des standards qu’il semble vénérer.
Arthur parle encore, mais je ne l’écoute plus. Moi, Virginie me plaît. Son corps me plaît, tel qu’il est.
Après un moment de silence lourd, Arthur se lève soudainement du canapé, brisant l’immobilité de la pièce. Il ajuste machinalement sa veste, comme s’il cherchait à se débarrasser de la tension palpable qui plane entre nous. Puis, avec une légèreté presque déplacée, il lance :
— Je vais sortir, j’ai des copains qui m’attendent. Virginie ne m’a pas demandé de rester, alors…
Et sans même un regard vers moi, il prend la porte. Aucun au revoir, aucune excuse. Rien. Il part sans un mot de plus, comme si la conversation ne méritait pas même de se conclure. Je reste là, figé dans une sorte de stupeur, incapable de comprendre ce qui vient de se passer. Son départ, si brusque, m’étonne, mais dans un coin de ma tête, je sais qu’il ne voulait pas être là. Pas maintenant. Il préfère fuir, sortir, comme si cette tension avec Virginie était trop lourde à porter pour lui. Il a pris la porte comme on évite un problème, sans jamais en faire face.
Lorsque la porte se referme derrière Arthur, un silence pesant s’installe dans l’appartement. Je suis seul dans le salon, et c’est à cet instant là que Virginie revient, les yeux rouges, ses traits marqués par les larmes. Son visage est dévasté, un éclat de douleur dans ses yeux que je n’avais jamais vu auparavant. Elle entre dans la pièce, sans même me regarder, puis se fige en me voyant.
— J’ai tout entendu… murmure-t-elle.
Sa voix est calme, presque trop, mais ses yeux trahissent la blessure encore vive. Elle garde la tête haute, mais je perçois cette fragilité sous la surface, cette douleur sourde qu’elle refuse de laisser éclater.
— Ne l’écoute pas, dis-je aussitôt, cherchant les bons mots, ceux qui apaisent, qui réparent. Il ne sait pas de quoi il parle.
Elle esquisse un sourire amer.
— Peut-être qu’il dit tout haut ce que beaucoup pensent tout bas…
— Non. Il dit tout haut ce que des idiots pensent.
Elle relève les yeux vers moi, cherchant à lire la sincérité dans mon regard. J’aimerais pouvoir effacer en un instant ce qu’elle ressent, balayer d’un mot ses doutes et son mal-être, mais je sais que ce n’est pas si simple. Alors, je fais ce que je peux.
— Tu es belle, Virginie. Comme tu es.
Elle ne répond pas tout de suite, mais quelque chose semble s’adoucir en elle. Puis, alors que je m’apprête à partir pour lui laisser un peu de répit, elle m’arrête d’un geste, attrapant doucement mon poignet.
— Reste encore un peu… s’il te plaît.
Il y a dans sa voix une requête que je ne peux ignorer. Un besoin d’être vue, d’être comprise.
Elle inspire profondément, puis, lentement, défait à nouveau son peignoir. Le tissu glisse sur ses épaules, dévoilant sa peau, son corps qu’elle me livre sans barrière cette fois.
— Regarde-moi… comme à l’hôpital.
Son regard plonge dans le mien, cherchant une vérité, une confirmation. Elle ne veut pas seulement être rassurée par des mots. Elle veut être vue, réellement. Acceptée.
Alors, je la regarde. Pas avec la froideur d’un observateur distant, mais avec toute l’attention qu’elle mérite. Je la contemple comme elle est, avec la tendresse et l’admiration qu’elle refuse encore d’avoir pour elle-même.
Un silence s’étire entre nous, chargé de quelque chose de nouveau. Une chaleur diffuse, une tension qui s’installe doucement. Puis, dans un souffle, elle murmure :
— J’ai envie de toi…
Sa propre voix semble la surprendre, comme si elle découvrait ce désir au moment même où elle le formulait. Son regard s’accroche au mien, incertain mais brûlant.
— J’ai envie que tu me touches… mais pas juste pour me réconforter.
Elle fait un pas vers moi, pose une main sur ma nuque, son pouce effleurant ma peau. Elle hésite, cherche ses mots, puis finit par lâcher, dans un souffle à peine audible :
— Je veux que tu me fasses l’amour.
Elle inspire profondément, comme si elle n’était pas certaine d’avoir le droit de demander cela.
— Je veux le sentir. Te sentir. Oublier tout le reste, oublier ce qu’il a dit, oublier ce que je pensais savoir sur moi-même.
Sa sincérité me bouleverse. Ce n’est pas qu’un simple désir charnel, c’est plus profond que ça. Elle veut se réapproprier son corps, retrouver confiance en elle à travers mes mains, à travers mon regard. Elle ne veut plus se cacher.
Alors, je m’approche, doucement, et laisse mes doigts effleurer sa peau avec cette même admiration qui brûle en moi depuis le début. Elle frissonne sous mon toucher, s’abandonne peu à peu, m’offre ce qu’elle n’a jamais osé donner à quelqu’un d’autre.
Et cette nuit-là, ce n’est pas seulement son corps que je découvre, mais tout ce qu’elle est. Chaque frisson, chaque soupir, chaque hésitation.
Dans l’intimité de cette chambre, il ne reste plus de doutes, plus de jugements, plus de peurs. Il n’y a qu’elle et moi.
Et c’est tout ce qui compte.
À partir de ce jour-là, tout a basculé. Nous sommes devenus amants, complices dans le secret, trouvant dans l’ombre des moments volés pour nous retrouver. Chaque rendez-vous était un prétexte pour explorer nos désirs, nos corps cherchant toujours plus à se satisfaire, à se redécouvrir avec une intensité dévorante. Chaque caresse, chaque regard échangé en cachette nourrissait cette passion naissante, à la fois interdite et irrésistible.
Mais cette parenthèse clandestine n’a pas duré éternellement. L’ardeur de notre relation a éclipsé tout le reste, rendant impossible de continuer à feindre. Peu à peu, l’évidence s’est imposée : il nous fallait plus. Alors, nous avons choisi de tout quitter, de briser nos attaches, afin de vivre cette passion pleinement, librement, sans retenue ni secret. C’était un saut dans l’inconnu, mais c’était nous, ensemble, consumés par ce feu qui refusait de s’éteindre.
Lire la suite de cette histoire : [Partie 2] : L’éveil de Virginie : un voyage intérieur
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[…] J’aimerais savoir ce que tu as ressenti quand je t’ai conduite à l’hôpital ce jour-là, quand tu as eu ce problème au […]
[…] jeta un œil à la notification et sentit immédiatement son cœur s’accélérer. Un message de Virginie. Il ouvrit discrètement l’aperçu, mais ce qu’il vit le fit se raidir sur sa chaise : une […]